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Croire en nos entrepreneurs;: nouvel impératif national

4/3/14



Les Echos


 
POINTS DE VUE

Croire en nos entrepreneurs : nouvel impératif national !

Par Les Echos | 02/01 | 06:00 | mis à jour à 09:38
 

La France ne dispose pas des mêmes leviers que les Etats-Unis pour enrayer le recul de l’emploi industriel. Mais elle possède un atout : la qualité de ses entrepreneurs. Plusieurs exemples prouvent que les « success stories » sont toujours possibles dans notre pays... à condition de les encourager. Le point de vue de François Dalens.

Made in America, again ! » Le titre de l’étude que nous avons récemment conduite traduit bien le mouvement de réindustrialisation en cours aux Etats-Unis, rendu possible par un coût du travail et de l’énergie très compétitif. Nos ­prévisions pour ce pays sont sans équivoque : le Boston Consulting Group (BCG) prévoit ainsi un bond de la production de l’ordre de 80 à 120 milliards de dollars et la création de 2 à 3 millions d’emplois d’ici à 2015. Depuis la publication de ce rapport, beaucoup nous interrogent : et si le phénomène s’étendait bientôt à la France ?

Nous aimerions évidemment être porteur de bonnes nouvelles et pouvoir répondre aussi affirmativement que pour les Etats-Unis. Malheureusement, quelques tendances lourdes ne peuvent être négligées. En trente ans, la France a perdu cinq places sur le podium industriel mondial pour atteindre la 14e place. Dans le même temps, 40 % des emplois industriels ont été perdus, soit deux fois plus qu’en Italie et sept fois plus qu’en Allemagne sur la même période. Cette hémorragie est devenue insupportable. Elle sape notre puissance économique et fragilise notre tissu social.

Peut-on pour autant espérer une inversion de tendance dont la légère reprise de notre croissance annoncerait en quelque sorte les prémices ?

Comme nous le soulignons dans un rapport menée pour l’« action tank » Entreprise et pauvreté (*), l’origine du malaise prend racine dans quelques fondamentaux économiques incontournables. D’ici à 2015, nous estimons que le coût du travail industriel en France, en intégrant les charges et la productivité, sera supérieur de 12 % à celui des Allemands, de 24 % à celui des ­Suédois et de 38 % à celui des Américains. Autre point de faiblesse : le coût de l’énergie n’est plus un avantage compétitif majeur, face à l’émergence de nouvelles sources de gaz (eaux profondes, schiste) qui restent inexploitées dans notre pays. Sans évolution de ces fondamentaux, la France ne peut espérer jouer sur son sol le « miracle américain ».

Pas question pour autant de sombrer dans un pessimisme vain, et nos entrepreneurs nous donnent des ­raisons de croire en notre avenir.

Modèles gagnants

La clef du renouveau industriel passe par la promotion et le partage des modèles gagnants de ces milliers de chefs d’entreprise. Certaines ­stratégies éprouvées peuvent être reproduites pour bâtir des projets industriels prospères et pérennes.

A travers l’analyse de dix success-stories industrielles françaises, nous avons identifié des leviers stratégiques à actionner. Parmi eux, notons en priorité : l’accès à l’export, l’intégration de matières premières ­innovantes, la colocalisation avec l’Afrique du Nord, la co-innovation industrielle et le développement de labels made in France (entre 50 et 70 % des Français sont prêts à payer plus pour du made in France ; entre 25 et 35 % sont prêts à payer plus de 10 % plus cher). Ce sont des leviers très forts de création de valeur pour nos entreprises et pour notre économie !

Il est urgent d’encourager également le goût d’entreprendre et quelques belles histoires nous incitent à l’optimisme. Deux exemples pris parmi tant d’autres : Christophe Chevalier a redynamisé sa région en redonnant vie à l’industrie de la chaussure à Romans ; Thierry Moysset a relancé la production de Laguiole en 2007, alors que l’entreprise était en dépôt de bilan. Il a parié sur le savoir-faire local, la qualité du produit et sa notoriété mondiale. L’enjeu est de donner les moyens à ces histoires de se multiplier, aux bonnes pratiques d’être pollinisées, aux projets porteurs d’être lancés. Encourager les entreprises à tous les niveaux, en facilitant les solutions de financement et en valorisant les produits issus des territoires est devenu une urgence.

Plus qu’économique, l’impact sera également social. La suppression de 2 millions d’emplois industriels depuis 1980 a appauvri de nombreux Français. Les ouvriers non qualifiés sont particulièrement touchés, avec un taux de chômage qui stagne autour de 20 %. Pour encourager le retour à l’emploi de cette catégorie, l’investissement dans les technologies de recyclage, permettant le développement d’activités de tri ou encore la distribution en multicanal ou en « cycles courts » qui crée des emplois de livraison de proximité sont des pistes intéressantes. Des opportunités existent. Aux entrepreneurs de les saisir !

Le changement industriel viendra des entrepreneurs ou ne viendra pas. C’est grâce à l’audace d’hommes et de femmes de tous horizons que nous redonnerons un avenir industriel à la France !

François Dalens est directeur général France du Boston Consulting Group.

(*) Etude « Réindustrialisation et Pauvreté », Boston Consulting Group pour l’« action tank » Entreprise et Pauvreté, octobre 2013.

 

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