E-ENCYCLOPEDIE-  -ETRAVE- 
 


                        Visiteurs depuis fin 2012
 


 
 -
    
 Copyright  W4N1B4                                        
                                                                                                                                                            1962 arrivée inaugurale du France à New-York  peint par Marie-Marin     
 

Reprendre son entreprise en Scop: une aventure à hauts risques

20/11/13



http://lentreprise.lexpress.fr/


Reprendre son entreprise en Scop: une aventure à hauts risques

Le projet de loi Hamon sur l'économie sociale et solidaire prévoit de créer un droit d'information préalable pour inciter les salariés à racheter leur entreprise. L'une des solutions pour cela est la Scop (société coopérative et participative). L'Entreprise a rencontré des salariés qui témoignent de leurs efforts pour sauver leur outil de travail et leur emploi. Un parcours souvent semé d'embûches.

Par Etienne Gless pour LEntreprise.com, publié le 

Reprendre son entreprise en Scop: une aventure à hauts risques

Dans son projet de loi sur l'économie sociale et solidaire (ESS) adopté par le Sénat le 7 novembre 2013, Benoît Hamon, ministre délégué à l'économie sociale et solidaire, entend doubler en l'espace de 5 ans le nombre d'emplois et de Scop (sociétés coopératives et participatives) existantes en France. Ici l'entreprise Coretec à Vaulx-en-Velin (69) transmise à ses salariés sous forme de Scop en juillet 2013.

DR

" Si c'était à refaire, je me sauverais en courant ! ". Fabrice Nominé gérant de Société nouvelle Gaultier Mouron à Nancy, le reconnaît volontiers : reprendre et relancer la petite entreprise lorraine spécialisée dans l'usinage n'a pas été une sinécure. Liquidée en janvier 2010, la PME renaît de ses cendres un mois plus tard sous la forme d'une Scop (société coopérative et participative) créée par Fabrice Nominé et sept autres salariés (sur un effectif global à l'époque de 12 personnes). "Comme l'entreprise était liquidée, nous n'avions plus le droit en théorie de travailler mais nous sommes quand même restés un mois pour assurer le suivi de la clientèle, confie le gérant de la Scop, sans salaire, dans la quasi illégalité mais pour ne pas perdre les clients." En février 2010 l'activité a repris le plus légalement du monde après la création de la nouvelle structure. Les démarches se sont faites en tenant à l'écart l'ancien dirigeant, reconnaît Fabrice Nominé, 15 ans d'ancienneté chez Gaultier Mouron d'abord comme préparateur puis gestionnaire d'atelier. " Nous avons discuté en toute discrétion le soir avec le mandataire judiciaire et les banques. Ce n'était pas évident à gérer ". Heureusement les salariés apprentis entrepreneurs ont pu s'appuyer sur la logistique fournie par le mouvement des Scop : " Ils nous ont beaucoup aidé dans nos démarches avec les banques notamment pour réaliser le montage financier " insiste le nouveau patron.

Une vie après...

La preuve par l'exemple qu'il peut y avoir une vie pour une entreprise après sa mise en liquidation judiciaire. A condition de faire montre d'un peu d'espoir et de beaucoup d'énergie. Ce que confirme Dorothée Blaise-Leneuf, gérante de la Miroiterie GBM à Isle (Haute-Vienne) reprise en Scop en 2011. " Le vendredi 15 octobre 2011 nous étions liquidés. Le lundi 18 nous rouvrions et redémarrions à 27 personnes ". Leur motivation : préserver un savoir-faire ancestral, sauvegarder une qualité unique, sauver son propre emploi... " Après deux cents ans d'existence, les clients nous disaient : " vous ne pouvez pas arrêter vous êtes les seuls à nous livrer dans la Creuse ! ", se souvient Dorothée Blaise Leneuf.

Encourager la reprise par les salariés...

Avec son projet de loi sur l'économie sociale et solidaire (ESS) adopté par le Sénat le 7 novembre 2013, Benoît Hamon entend faciliter la reprise d'entreprise par les salariés. Il prévoit que ceux-ci soient informés deux mois à l'avance d'un projet de cession pour leur permettre de formuler une offre.
Autre objectif : augmenter les Scop. Benoit Hamon veut aussi doubler en l'espace de 5 ans le nombre d'emplois et de Scop (sociétés coopératives et participatives) existantes en France. Actuellement la France compte environ 23.000 salariés associés dans 2000 Scop qui emploient au total 40.000 personnes, avec des effectifs moyens de 20 salariés.

Pour autant la reprise d'entreprise par les salariés ne concerne pas que des activités déficitaires ou des canards boîteux. " Le personnel n'est pas uniquement appelé à la rescousse quand l'entreprise va mal et que personne d'autre n'en veut " prévient la direction de la confédération générale des Scop, le mouvement des sociétés coopératives et participatives. Sur les 248 nouvelles Scop créées en France en 2012, 25 (10%) sont le résultat de la transmission aux salariés d'entreprises saines contre une douzaine seulement issues de la reprise d'entreprises en difficulté (5%). "J'ai envisagé de transmettre mon entreprise à mes salariés quand j'ai vu leurs performances individuelles et collectives, leur cohésion d'équipe et leur réel désir d'entreprendre", confie par exemple Denis Chazelet, fondateur dans les années 90 de Coretec une PME qui opère dans les services énergétiques à Vaulx-en-Velin (Rhône). 

 

Très active sur le marché des services aux industriels, l'entreprise était prospère et en croissance mais affrontait un problème classique de succession: en France chaque année 10 % des entreprises à céder ferment faute de trouver un repreneur. "Coretec est devenu un acteur important dans les domaines du chauffage urbain, des utilités et de la performance énergétique. C'est pour conserver et prolonger cet héritage que nous avons repris l'entreprise en 2013", explique Vincent Chevais le nouveau PDG. " Vendre à l'extérieur à des grands groupes, c'était faire prendre un risque à l'entreprise et aux salariés. C'est ainsi qu'a germé l'idée d'une transmission au personnel sous forme de Scop ". Vincent Chevais prend alors contact avec l'Union régionale des Scop en Rhône-Alpes pour l'aider à ficeler le projet avec 14 des 21 salariés. " La gestation du projet de transmission a pris 18 mois : c'est un peu plus compliqué que le simple rachat par un acquéreur extérieur, insiste le nouveau PDG qui met en valeur l'accompagnement " très professionnel " du mouvement Scop dont le délégué régional a joué le rôle d'animateur " pour faire comprendre et assimiler le projet par chacun ".

Un accompagnement nécessaire

Une fois le grand saut accompli les débuts sont parfois euphoriques : l'activité redémarre sur des bases nouvelles, les salariés deviennent associés et ont voix au chapitre, les subventions et les aides publiques abondent. Mais l'embellie peut ne pas durer. " Nous avons touché nos ARCE (Aides à la Création et reprise d'Entreprise, versée par Pole Emploi) et nous avons été exonérés de charges sociales pendant un an comme pour toute création de société, détaille Fabrice Nominé. Mais aujourd'hui la société Gaultier Mouron paie ses charges " plein pot " et affronte une conjoncture morose. Nous ne sommes plus du tout dans l'euphorie de la première année en 2010 quand nous fonctionnions avec zéro charges " reconnait le gérant.

Redorer son blason

Autre difficulté à laquelle sont souvent confrontés les salariés repreneurs, la mauvaise image de marque des opérations de reprise en Scop. " Pour beaucoup de gens, entreprise en Scop est synonyme d'entreprise en difficulté ", regrette Vincent Chevais à la tête de Coretec à Vaux-en-Velin. Or dans ce cas précis le projet de reprise a été murement réfléchi et préparé avec le fondateur et cédant, Denis Chazelet, pendant 18 mois, la transmission n'étant nullement dictée par l'urgence et les difficultés économiques.

Pour éviter que des rumeurs négatives circulent, Coretec a donc pris les devants en contactant ses clients et fournisseurs. Un courrier leur a été envoyé dès la signature de la cession en juin 2013 pour leur détailler le nouveau projet de l'entreprise. " Nous avons eu d'excellents retours et même des encouragements " se félicite Vincent Chevais.

Les banques, autres partenaires incontournables de l'entreprise, sont elles aussi parfois peu enclines à jouer le jeu, soulignent les repreneurs. " Les banques ont attendu que ça tourne bien pour nous, remarque Dorothée Blaise-Leneuf. Elles ont mis 6 mois avant de nous prêter de l'argent en avril 2012. Si nous n'avions pas eu le soutien de la région et d'autres entrepreneurs, les choses auraient pu mal tourner ".

On ne s'improvise pas entrepreneur

Dernier obstacle d'origine interne celui là : la capacité des salariés associés au capital de la Scop à gérer au mieux l'entreprise. Car on ne s'improvise pas entrepreneur. Les salariés qui participent à ce type d'aventures vont avoir besoin de temps pour acquérir les connaissances financières nécessaires à la compréhension des comptes de l'entreprise et de son business plan. En outre lorsque l'entreprise est mal en point (redressement, liquidation...), les héros sont souvent fatigués au moment de la reprise . " Quatre plans de licenciement en quelques années ont fait tomber les effectifs de la miroiterie de 150 à 50 personnes ", se souvient Dorothée Blaise-Leneuf. Et les trois ans de procédure collective jusqu'à ce que le tribunal prononce la liquidation judiciaire ont épuisé les forces des 50 derniers salariés. " Après trois ans de redressement judiciaire les gens étaient à bout ! " confie l'ancienne directrice administratrice et financière devenue gérante, et cheville ouvrière de la reprise de la miroiterie.

Même en mode coopératif, la société est soumise à l'impératif de profitabilité comme n'importe quelle autre entreprise et l'exercice de la démocratie selon le principe " un homme une voix " n'est pas toujours compatible avec les impératifs de gestion qui commandent de décider et d'agir vite. " Le risque c'est que les salariés devenus associés croient qu'ils vont pouvoir donner leur avis sur tout et tout le temps, prévient Vincent Chevais. Ils doivent jouer leur rôle d'associés une fois par an dans les assemblées générales, et c'est tout. Au quotidien il faut conserver le fonctionnement classique d'une entreprise normale. Ce qui compte c'est de rester performant dans notre activité économique ", estime le PDG de Coretec. Même son de cloche pragmatique chez GBM : " Je ne réunis pas tout le personnel associé pour chaque décision ! " explique la gérante de la miroiterie.

" Les collègues sont devenus associés et chacun se prend pour le patron alors qu'on est quand même une société ", déplore de son côté Fabrice Nominé qui confie : " Tout le monde n'accepte pas mes remarques. Certains se considèrent avant tout comme des partenaires : on ne peut rien leur dire ! ". Et le gérant de Gaultier Mouron à Nancy convient qu'il avait sous-estimé ces difficultés humaines. " C'est très compliqué et de fait la reprise d'entreprise par les salariés, ce n'est pas la panacée " reconnaît avec dépit ce patron pour qui, trois ans après l'opération de reprise, c'est la gouvernance et le management des hommes plus que les difficultés de conjoncture ou le poids des charges sociales qui constitue le plus gros obstacles à surmonter.

 

" Et si le meilleur des repreneurs était déjà dans votre entreprise... "

Le mouvement des Scop a fait campagne en septembre 2013 en faveur de la reprise des entreprises par leurs salariés un slogan - " Et si le meilleur des repreneurs était déjà dans votre entreprise... " La confédération générale des Scop veut inciter notamment les dirigeants de PME qui envisagent de passer la main à considérer davantage la possibilité d'une cession de leur affaire en interne au personnel. " 10 % des entreprises à céder ferment chaque année faute de repreneur et le départ à la retraite du dirigeant est la cause d'une cession sur deux " explique Jean-Luc Gronner, le publicitaire qui a conçu le dispositif. Le spot de pub - un film de 30 secondes diffusé à la TV et sur le web - met l'accent sur le lien cédant-salariés et pointe avec humour les risques de la cession à un tiers, un repreneur extérieur qui connait moins intimement la société. Une campagne qui vise aussi à lutter contre l'idée reçue selon laquelle une reprise en Scop est synonyme de reprise d'entreprise en difficulté


En savoir plus sur http://lentreprise.lexpress.fr/reprise-entreprise/reprendre-son-entreprise-en-scop-une-aventure-a-hauts-risques_43273.html?xtor=EPR-11-[ENT_Zapping]-20131119--117951671@270540536-20131119063521#H4Xe8C4XRuWRiUg7.99

Partagez sur les réseaux sociaux

Catégories

Autres publications pouvant vous intéresser :

Commentaires :

Laisser un commentaire
Aucun commentaire n'a été laissé pour le moment... Soyez le premier !



Créer un site
Créer un site