«Conduite du changement et gestion des émotions»
par Agnes Menso, coach certifiée HEC
MSc in Consulting & Coaching for Change, HEC - Oxford Saïd Business School1
La trilogie sur les best practice de la conduite de changement se termine avec ce chapitre consacré à la gestion des émotions. Respecter les étapes du changement
Par manque de temps, ces étapes sont souvent parcourues trop rapidement. Nous en comptons 7 : le choc (lié à l’annonce de la nouvelle), le refus, la colère, la dépression, le marchandage, le test et l’acceptation. Vivre chacune d’elles est néanmoins indispensable afin de s’approprier et d’intégrer le processus de changement.
Référons-nous par exemple à la pyramide de Maslow, qui hiérarchise et distingue cinq types de besoins.
Prenons comme projet de transformation, un déménagement, qui, nous le savons, est un des projets les plus difficiles à vivre au sein d’une organisation.
Selon le niveau hiérarchique des collaborateurs, ce changement va bouleverser leur zone de sécurité (niveau 2) ou d’appartenance (niveau 3).
Or, selon Maslow, le passage au niveau supérieur ne peut se faire qu’après validation des niveaux précédents.
Il est donc quasiment impossible sur le long terme pour un collaborateur de s’impliquer et se motiver sur des projets de niveau 4 tant que les besoins des niveaux inférieurs ne sont pas satisfaits.
Les étapes du changement sont génératrices d’angoisse. Pour que le projet de transformation soit accueilli et vécu dans les meilleures conditions, nous vous conseillons de respecter chacune de ces étapes et de porter une attention toute particulière aux phases d’acquisition et d’apprentissage des nouvelles compétences.
Comprendre les résistances et les peurs
Ces peurs sont légitimes et sont une des quatre émotions de base, avec le joie, la colère et la tristesse.
Ce collaborateur résiste-t-il car il sent son emploi menacé ?
Cette équipe résiste-t-elle par crainte de ne pas être à la hauteur dans sa nouvelle mission ?
Formuler ces résistances dans un groupe de parole ou par le biais de séances individuelles ou collectives de coaching permet d’identifier obstacles et croyances.
Après quelques séances, les perceptions commencent peu à peu à changer. C’est généralement à ce moment-là, que le processus s’enclenche.
Favoriser les échanges
La création de groupes de parole peut être une solution. Ils permettent à chacun de s’exprimer dans un cadre précis, défini et tenu par votre intervenant.
Il n’y a pas de recette pour créer ces groupes. Vous pouvez opter pour un mode aléatoire (ou semi-aléatoire) mais nous vous conseillons d’éviter dans un premier temps les groupes avec des liens hiérarchiques entre participants.
La médiation, si le dialogue est rompu, peut également être d’une grande utilité. En plus de traduire une volonté de co-construction, elle permet de retrouver un espace de partage.
Le manager et la Direction ont peu de temps pour s’inscrire dans cette démarche et sont rarement formés sur ces aspects. De plus, les collaborateurs peuvent être suspicieux quant à la démarche et réfractaires pour s’exprimer comme ils le souhaiteraient.
C’est la raison pour laquelle, nous vous suggérons de confier l’animation de ces groupes à un professionnel qui sera garant du cadre de l’intervention. Il saura également, dans le respect des règles de confidentialité et de déontologie, vous alerter et favoriser la transition d’une étape à l’autre, avec recul et bienveillance.
Respecter les valeurs de l’entreprise
Si vous défendez des principes de proximité ou de communication, nous vous conseillons de les faire vivre dans votre quotidien. Pour chacune de vos actions, demandez-vous si votre comportement est en adéquation avec ces valeurs. N’hésitez pas non plus à sensibiliser vos équipes sur cet aspect. Par exemple, si vous devez mener une vaste opération de réduction des dépenses, faites preuve d’exemplarité dans vos frais de déplacement et dans les lieux que vous choisissez pour l’organisation de vos séminaires...
Ecouter votre intuition
Elle est malheureusement trop peu utilisée car jugée comme irrationnelle. Même si cela est exact, l’intuition est un messager et peut constituer un élément important dans votre prise de décision. Elle permet également de nuancer des positions trop rationnelles et parfois trop rapides ou brutales.
Ecouter son intuition cela signifie également l’exprimer lors d’un COMEX, CODIR ou comité de pilotage... Même si genre d’intervention peut être mal perçu dans ce contexte, en allant jusqu’au bout de votre intention, vous ouvrez d’autres portes de discussion et autorisez vos équipes et collègues à faire de même.
Que nous parlions d’un changement de rupture ou d’un changement en continu, celui-ci équivaut à modifier en profondeur l’ADN d’une entreprise. Il y a « un avant » et un « après ».
L’homéostasie (du grec homoios, « similaire » et histēmi, « immobile »), dont nous parlions en introduction, est une notion fondamentale de la conduite de changement. Ces best practice ont pour but de vous aider à prendre du recul afin de mener et réussir, dans le respect de vos valeurs, un projet de transformation.
La conduite de changement est un arbitrage permanent entre des processus mathématiques et financiers et le bien-être des collaborateurs. Les best practice que nous avons développées dans ces articles tendent vers cet équilibre.
Il n’existe pas de recette miracle pour réussir le changement. Anticipé, porteur de sens et piloté, il peut devenir une formidable opportunité de mobilisation pour une entreprise.
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1 http://www.agnesmenso-coaching.com/blog