Dans une tribune pour L'Usine Digitale, le président du Syntec numérique, Guy Mamou-Mani, souligne l'importance d'une véritable formation au numérique, après la publication du classement PISA. Selon lui, c'est un enjeu qui mérite une grande ambition nationale.
L'influence du numérique sur l'économie n'est pas qu'un enjeu technique, il participe à la construction d'un projet de société dont nous sommes tous les acteurs.
L'entrée de nos économies dans l'ère de l'économie numérique industrielle va questionner les fondements de chaque activité, industrielle, commerciale ou même artisanale, donc la capacité de chacun à y construire sa vie professionnelle.
Cet état de fait nous oblige, industriels, pouvoirs publics et acteurs de la communauté éducative et de la formation professionnelle, à agir pour que chacun dispose des conditions matérielles et culturelles lui permettant de construire son projet d'autonomie professionnelle et son émancipation personnelle. Etre à l'aise avec les outils numériques, c'est pouvoir prendre part aux activités économiques, mais aussi sociales de cette société. C'est un enjeu d'efficacité économique, autant que d'insertion sociale.
Jusqu'alors cantonnés à des spécialistes, spécialités d'ingénieurs, on parlera dorénavant autant de nouveaux métiers du numérique que de la capacité à chaque métier d'inclure des compétences numériques.
Il y aura toujours des étudiants ingénieurs, qui vont par ailleurs chercher à acquérir une double voire une triple compétence, au-delà de leur coeur de métier, mais il y aura de plus en plus de numérique dans l'orientation professionnelle dans tous les métiers, et dans la ré-orientation professionnelle.
Ainsi, dans son passionnant rapport sur l'Inclusion Numérique, le Conseil National du Numérique propose-t-il le soutien de l'Etat afin de favoriser l'insertion de 100 000 jeunes en trois ans par des emplois dans des entreprises numériques. Le Conseil propose en effet de changer le "regard sur les emplois numériques et les profils jeunes", jusqu'à l'ouverture d’écoles numériques de la Deuxième chance dans tous les départements.
Il n'est plus temps de former aux seuls outils techniques du numérique. Aujourd'hui, pratiquement tous, nous les utilisons. Plus important, c'est d'apprendre à utiliser le numérique dans tous les domaines de la vie pour étendre ses compétences et ses capacités, donc d'acquérir une culture numérique, de l'initiation au code à la compréhension de la logique des computer sciences, en passant par l'acquisition de compétences en traitement des données et par l’aptitude au travail collaboratif.
UNE POLITIQUE NATIONALE AMBITIEUSE D'ÉDUCATION ET DE FORMATION AU NUMÉRIQUE
Dans sa feuille de route de février 2013, le gouvernement avait demandé à Syntec Numérique d'être à l'initiative d'une étude prospective sur les besoins en compétences et en recrutement de la filière numérique, qui a été réalisée avec les partenaires sociaux et le ministère du Travail.
Pour la première fois en France, nous avons un diagnostic exhaustif pour tous les métiers numériques, dont les métiers émergents, avec une estimation de plus de 36 000 créations d'emplois nettes sur cinq ans. En regard, ce travail d'analyse dresse une cartographie des formations pour ces compétences.
Nous changeons d’économie, nous changeons de société, alors il est grand temps de mettre en place une politique nationale ambitieuse d'éducation et de formation au numérique permettant à chacun de construire sa vie. En complément, une étude sur la part que prennent les compétences numériques dans tous les autres métiers, serait la bienvenue.
Alors que sont engagées les discussions autour de l’avenir de la formation professionnelle et de l’apprentissage, cette question de la formation au numérique et à la culture numérique aurait le grand avantage de réunir tous les acteurs économiques, politiques, éducatifs et sociaux autour d’un enjeu majeur pour l’emploi : accompagner les transformations du travail de la 3ème révolution industrielle.
Guy Mamou-Mani
Président de Syntec Numérique