Bienvenue à toutes et à tous
M comme... management. Prononcer management en français. Manag'ment pour les anglophiles. La prononciation n'est pas sans importance car elle nous renseigne sur l'origine de cette notion et de cette pratique qui hantent les entreprises et au-delà. En effet, la vague managériale qui prit naissance il y a déjà quelques décennies gagnent les écoles, les organismes de formation puis les familles. L'instituteur-manager, les parents-manager, le formateur ou l'éducateur-manager... Il n'y aura plus que le prêtre à convaincre de manager ses ouailles. De quoi s'agit-il au bout du compte ? L'étymologie nous renseigne.
Soit vous partez d'Angleterre et de l'anglais to manage qui signifie qui s'occupe de quelque chose, qui conduit comme on dirait conduire un cheval. Il est vraisemblable que ce verbe anglais to manage se soit inspiré de l'italien manegiarre, maneggio, manège, c'est-à-dire là où l'on dresse les chevaux.
Soit vous partez de France au XVIIème siècle avec dans vos bagages le verbe « ménager » qui signifie gérer un bien, en disposer avec prudence mais aussi traiter avec égard, puis vous mêlez ces significations avec la culture anglaise et vous revenez avec to manage et management.
Fondamentalement, ménager et manager gardent le même sens : il s'agit de conduire avec prudence, avec ménagement, son attelage selon le vieil adage qui veut que si l'on veut aller loin, on ménage sa monture. Appliqué aux hommes,nous ne quittons pas la famille des équidés. Dans tous les cas, l'air ambiant et pénétrant est au dressage même si on emploie des précautions de style et d'usage. Certes, le manager n'est plus le dresseur. Il suit, il accompagne, il motive, conseille et use de toutes les habiletés pour faire entrer un individu dont le désir est différent du sien dans son propre désir.
Ce n'est pas simple. C'est vrai avec les enfants, c'est vrai aussi avec les élèves, c'est encore plus vrai avec les employés d'une entreprise. Quelque chose résiste toujours à marcher dans le pas de quelqu'un d'autre, parent, instituteur ou dirigeant. Platon déjà en fit les frais qui voulut faire sortir à toutes forces de la caverne des individus récalcitrants bien que ce fut « pour leur bien » disait-il !
Aussi, pour parvenir à nos fins, pour faire entrer le désir des autres dans le nôtre, tous les moyens sont bons. La menace existe toujours, la récompense aussi mais il est préférable que « ça » vienne de l'individu lui-même. On passe ainsi du « c'est pour ton bien » à « ça doit venir de toi » et si « ça ne vient pas », tu dois, par une posture assez tordue d'ailleurs, « travailler sur toi » !
Ainsi, on a vu fleurir, surtout dans les entreprises, toutes sortes de techniques visant à se poser soi-même comme objet afin de réduire son stress, de maîtriser ses émotions, d'apprivoiser son ennemi intérieur, etc. Tout cela et d'autres encore, grâce, par exemple, au zen-management, au management par les couleurs et grâce, ça vient de sortir, à l'équi-management. Rien à voir avec l'équité ou l'équitable dans une bonne relation de travail. L'équi-managment, c’est l'utilisation de la relation homme-cheval pour le management d’une équipe/monture au sein d'une entreprise. Un article de Cadre et Dirigeant Magazine nous explique que nous avons beaucoup à apprendre des chevaux, à commencer par le fonctionnement en groupe. Et même en matière de parité : ainsi à l’état sauvage, chaque troupeau est mené par une jument. C’est elle qui choisit les lieux de vie, tandis que l’étalon dominant protège le troupeau. » Fin de la citation. Ainsi va le monde des chevaux et des hommes !
Didier Martz, philosophe pratiquant, le jeudi 22 mai 2014
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