Mercredi dernier, nous avons vu que le plan robotique proposé par le gouvernement français en avril dernier peinait à convaincre même s’il constitue un indéniable coup de pouce au secteur.
Le sujet vous a indéniablement… chatouillé. Entre ceux d’entre vous qui partagent ma fascination pour les robots et ceux qui craignent pour les emplois — et qui me l’expriment de manière plus ou moins polie.
Les robots vont-ils détruire ou créer des emplois, je n’en sais rien. Sûrement les deux. Les études sur le sujet se contredisent et s’écharpent sans parvenir à complètement emporter l’adhésion, d’un côté comme de l’autre. Mais, comme je vous le disais mercredi, le secteur de la robotique — et tout particulièrement de la robotique de service — est porteur.
Des robots à votre service
C’est justement sur ces robots de service que le plan Montebourg souhaite miser. Une définition s’impose. L’IFR (l’International Federation of Robotics) les définit comme “un robot semi ou entièrement autonome qui fournit soit des services utiles au bien-être des êtres humains soit de l’équipement — à l’exclusion des opérations de fabrication”. Les robots de services incluent donc les robots de défense et d’exploration mais aussi les robots nettoyeurs de sols tout comme les robots chirurgiens, en passant par les robots jouets, serveurs ou encore de communication.
C’est donc sur ce secteur que mise tout particulièrement le gouvernement espérant de faire de l’Hexagone un acteur majeur d’ici 2020.
Effectivement, tout miser sur la robotique industrielle n’aurait pas forcément été un choix judicieux. Car il faut bien faire un constat d’échec, ou plutôt d’absence. Non seulement, comme nous l’avons vu mercredi, les entreprises françaises sont peu robotisées par rapport à leurs équivalentes italiennes ou allemandes, mais l’Hexagone ne comporte que quelques spécialistes de la robotique industrielle. Les grands noms européens dans le domaine sont plutôt allemands.
Reste donc la robotique de service qui recouvre, nous l’avons vu plus haut, un très large spectre de compétences et de domaines.
Des entreprises dans le flou
Les entreprises françaises spécialisées en la matière ne sont pas forcément très nombreuses. L’étude qui a servi de base à Montebourg pour proposer son plan robotique en a identifié entre 30 et 60 (oui, les chiffres ne sont pas très précis, ce qui n’a rien de rassurant) génératrices de quelques centaines d’emplois ultra-qualifiés.
Premier problème, ce sont essentiellement des PME, qui selon le club des partenaires du GDR Robotique cité par Libération : “n’ont pas la masse critique pour arriver au stade réellement industriel sur de multiples marchés”.
Quant aux grands groupes, comme le souligne le rapport commandé par le ministre, le flou règne tout autant. “Les quelques grands groupes industriels français concernés ne communiquent aujourd’hui pas autour de la robotique, qui reste pour la plupart d’entre eux un objet de veille plus qu’un sujet d’actualité”.
Pourtant, certains d’entre eux investissent dans les robots. C’est le cas par exemple d’EDF, d’Areva et du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) qui ont créé le projet INTRA (Groupe d’INTervention Robotique sur Accidents), chargé de l’intervention en cas d’accident nucléaire et qui a développé des robots capables d’intervenir dans des environnements radioactifs.
L’innovation, force et faiblesse de la robotique française
Des entreprises françaises pas forcément très nombreuses, mais en tout cas innovantes. Voilà au moins un atout français, la recherche. Le Groupement de recherche Robotique est ainsi constitué de 1 300 chercheurs et doctorants. Parmi leurs 8 axes de recherche, les robots humanoïdes, les véhicules autonomes ou encore la robotique médicale. Seulement, comme l’expliquait L’Usine Nouvelle : “les résultats de la recherche française en robotique, bien placée au niveau international, ont du mal à se frayer un chemin vers les entreprises. Manque de débouchés industriels, mais aussi problème chronique de manque de culture technologique des chercheurs français”.
Un problème qui est partagé par certaines entreprises du secteur. Un exemple parmi d’autres, le robot humanoïde, NAO, développé par la société française Aldebaran.
Bon, je vous avoue, quand je le vois, j’en veux un. Sauf que les applications pratiques de ce robot sont encore limitées. Pour le moment, il est surtout essentiellement utilisé dans un cadre thérapeutique et pédagogique pour développer les capacités d’apprentissage et de communication en particulier avec des patients autistes ou atteint de la maladie d’Alzheimer. C’est passionnant, mais cela ne permet pas à Aldebaran de conquérir le grand public.
Même problème avec les exosquelettes développés en partenariat par la société française Rb3d, et la direction générale de l’armement (DGA). Le résultat de ce travail commun, c’est l’exosquelette Hercule, qui doit permettre aux soldats de porter et manipuler des charges importantes.
Là encore, les possibilités sont de taille — d’autant plus que la plupart des pays militaires se sont lancés dans le développement d’exosquelettes capables d’améliorer les capacités de leurs soldats — mais Hercule reste pour l’instant à l’état de prototype.
La soubrette est un robot
Les entreprises françaises sont peu présentes sur un des segments les plus porteurs de la robotique domestique : celui du nettoyage, dont les robots aspirateurs sont les représentants les plus connus. En 2012, ce sont 1,3 million de robots aspirateurs qui se sont vendus dans une cinquantaine de pays, en progression de 120% depuis 2010. L’Asie est le segment le plus dynamique de ce marché puisque les robots aspirateurs y représentent en moyenne 12% des ventes d’électroménagers. Et l’Europe — France, Italie et Espagne en tête — se laisse aussi séduire, puisque ces robots y représentent déjà 8% des ventes. Mais les principales marques en la matière sont américaines ou asiatiques, pas européennes et encore moins françaises.
La médecine, secteur d’avenir pour l’Hexagone ?
La robotique de service française est-elle donc vouée à jouer un rôle de second plan ? Pas forcément. Et ce d’autant plus qu’une entreprise française, MedTech, est bien placée pour conquérir des parts d’un marché extrêmement prometteur : celui des robots médicaux.
Dans le domaine, c’est encore une société américaine qui est leader. Intuitive Chirurgical commercialise en effet le robot chirurgien Da Vinci. Ce robot est spécialisé dans les opérations sur “les parties molles”, comme on dit dans le jargon. A savoir des opérations sur la prostate, en chirurgie viscérale, ORL ou gynécologique.
En 2012, les ventes de robots médicaux avaient augmenté de 20% par rapport à 2011, à 1 308 unités, pour un marché estimé à 1,495 milliard de dollar. Et 367 000 opérations à travers le monde avaient été accomplies avec l’aide d’un robot, soit trois fois plus qu’en 2008.
Si le Da Vinci domine largement le marché, le Rosa de MedTech a de grandes ambitions. Ce robot est spécialisé sur les opérations sur le cerveau, et assiste le neurochirurgien lors de ses interventions. Le Rosa a été autorisé en 2008 en Europe et en 2009 aux Etats-Unis mais ne fait pas encore le poids face à la concurrence américaine. Avec 19 robots vendus, et 2 en cours de mise en service, MedTech est loin des 2 800 Da Vinci installés dans le monde.
MedTech devrait cependant passer à la vitesse supérieure avec son introduction en Bourse prévue pour fin novembre. L’objectif est de lever 20 millions d’euros, essentiellement consacré à la R&D et à la conquête du marché américain.
Autre atout de MedTech dans cette bataille des robots chirurgicaux : son nouveau modèle de Rosa, spécialisé dans les opérations de la colonne vertébrale, alors que les troubles liés au dos sont en constante augmentation.
Comme je l’expliquais dans Défis & Profits, les introductions en Bourse ne sont pas ma tasse de thé : trop de rumeurs et de spéculations. Si vous êtes tenté par MedTech, un conseil, attendez que l’actuelle frénésie autour de cette valeur se calme.
Dans Défis & Profits, je ne me suis donc pas intéressée aux spécialistes français de la robotique mais à une société américaine leader dans le domaine et qui a pour principal atout sa diversification. Robots de défense et de surveillance, robots médicaux et robots domestiques constituent les trois pans principaux de son développement. Une valeur solide pour profiter de l’engouement pour les robots, et à retrouver dès aujourd’hui dans Défis & Profits.