C'est le dernier-né d'une famille qui s'agrandit. Bienvenue à The Family, un "accélérateur" de start-up installé entre la Normandie et Paris, qui a annoncé, lundi 12 août, une levée de fonds de 1 million d'euros auprès d'Index Ventures, l'un des plus importants fonds de capital-risque d'Europe.
Depuis la fin des années 2000, les dispositifs de soutien aux jeunes pousses font florès dans la capitale. "En quelques années, la transformation est impressionnante", avoue Roxanne Varza, une Californienne francophile, qui s'occupe de Spark, l'incubateur parisien de Microsoft.
A Paris, il existe, aujourd'hui, des dizaines de ces structures qui fournissent locaux et services aux créateurs d'entreprise. Il y a ceux de la région Ile-de-France, de la mairie de Paris, des écoles de commerce ou d'ingénieurs, en attendant l'ouverture, en septembre, du "Grand Lieu", dans le quartier du Sentier (2earrondissement), et celle – à un horizon plus lointain – de la Halle Freyssinet, près de la gare d'Austerlitz (13e arrondissement)...
La plupart s'inspirent d'un des pionniers du genre, le Y Combinator, en Californie. Un accélérateur prestigieux, fondé en 2005, d'où sont sorties des start-up désormais célèbres comme Reddit, Airbnb ou Dropbox.
Y Combinator accueille des projets dans leur phase initiale – souvent, la société en tant que telle n'existe pas encore –, pour les aider à aboutir à un produit ou à un service commercialisable. Le tout en échange d'une participation dans le capital de l'entreprise.
"FAIRE LE TRI PLUS VITE ENTRE LES BONNES ET LES MAUVAISES IDÉES"
L'avantage des incubateurs ? "Quand on y est, on peut faire le tri plus vite entre les bonnes et les mauvaises idées de commerce, voire changer de modèle économique le cas échéant", souligne Nicolas Celier, du fonds de capital-risqueAlven Capital.
The Family tente de se démarquer et d'attirer les meilleures idées de start-up."Nous disposons d'un hôtel particulier dans le Marais, au coeur de la capitale, où nous organisons des dîners raffinés. L'idée, c'est de créer des occasions de rencontres, avec d'autres entrepreneurs, des investisseurs, des grands groupes et même des gens du secteur public", explique Alice Zagury, une des fondatrices.
Le trio assure vouloir multiplier les vocations d'entrepreneurs dans le pays."Aujourd'hui, on peut créer sa société avec 5 000 euros. Mais beaucoup de gens n'osent pas. Les artistes, les designers et les informaticiens aussi peuventdevenir de très bons entrepreneurs", assure, enthousiaste, Mme Zagury.
Chaque semaine, les jeunes pousses ont droit à un entretien avec un membre de l'accélérateur, à un atelier technique ou à un dîner de réseau. "Nous ne fournissons pas d'espace de travail, il existe assez de structures qui procèdent ainsi", précise Mme Zagury.
En échange de son soutien, The Family demande 1 % du capital de chaque start-up. Mme Zagury compte aussi sur l'organisation d'événements payants pour sefinancer. Elle a déjà lancé les "no-bullshit sessions" : un entrepreneur défend son projet auprès de quelques investisseurs, devant un parterre de start-up. The Family a déjà reçu 800 candidatures. Une trentaine d'entre elles ont été retenues."A terme, nous voulons aider une centaine d'entreprises par an. Comme une famille, nous offrons éducation et privilèges", poursuit Mme Zagury.
DES INVESTISSEURS PRESTIGIEUX
A Paris, les premières structures de soutien aux start-up étaient surtout financées par des fonds publics (les pépinières de la Ville de Paris et de la région Ile-de-France). Aujourd'hui, les investisseurs privés prennent le relais, espérant fairefortune en prenant un "ticket" dans un futur réseau social comme Instagram ou Tumblr...
Ainsi, derrière le Camping et le Grand Lieu, on trouve des financements deGoogle. Le projet de la Halle Freyssinet est soutenu par Xavier Niel, actionnaire àtitre personnel du Monde. Microsoft a lui aussi créé son propre incubateur, Spark."C'est la preuve qu'il existe un vrai modèle pour les accélérateurs en France", se félicite Marie Vorgan Le Barzic, déléguée générale de Silicon Sentier, une association de soutien au numérique.
L'Accélérateur, une structure pilotée par Michel de Guilhermier, l'ancien patron de Photoways, est lui aussi financé par de prestigieux investisseurs, comme le fonds de capital-risque Partech ou la famille Leclercq, propriétaire de l'empire Decathlon. Il prend en moyenne 6 % du capital de ses hôtes, mais ne suit – de près – qu'une vingtaine de start-up par an. "La difficulté, c'est de trouver les bons coachs, à la fois expérimentés, impliqués et pédagogues", constate M. de Guilhermier.
"Paris, on aime, il y a beaucoup de talents", affirme Martin Mignot, chargé de repérer les start-up prometteuses pour le fonds londonien Index Ventures, qui participe à l'aventure The Family. "Cet investissement nous permettra de détecter les projets intéressants, de trouver des sociétés plus structurées juridiquement et financièrement, et de suivre la progression des équipes au fur et à mesure",ajoute-t-il.
N'y a-t-il pas déjà trop d'accélérateurs et autres incubateurs aujourd'hui dans la capitale ? "Il n'y a jamais trop d'initiatives. Le milieu start-up n'est pas encore assez développé pour qu'il existe une réelle concurrence entre les incubateurs !",veut croire Roxanne Varza.
Lire aussi : Start-up: les pièges de la conquête de l'Ouest