Bloc Note de Bertrand DUPERRIN |
Posted: 25 Jul 2013 05:00 AM PDT
Un tweet à circulé sur twitter il y a quelques temps. Il disait que le web détruisait des emplois. Chiffres à l’appui : Kodak avait 14 000 salariés, Instagram en a 13. CQFD. Un raccourci surement un peu trop facile. Si Instagram représente une évolution des usages qu’à pu rater Kodak la comparaison s’arrête là. Mais l’idée n’est pas dénuée de tout fondement : une entreprise qui exploite au mieux la capacité collaborative et participative du web social a besoin de beaucoup moins d’employés qu’une qui ne le fait pas, et ce pour arriver à des résultats supérieurs. La collaboration transforme les structuresC’est d’abord au niveau du marketing et globalement de la mobilisation des clients et du grand public que cela se voit. Une bonne utilisation des médias sociaux peut largement mettre au chômage un grand nombre de petites mains de votre département marketing ainsi qu’à la communication. Idem pour le support client : ce qui rend possible le modèle des opérateurs téléphoniques low cost est le transfert de tout ou partie du support vers des communautés d’utilisateurs. On peut même aller jusqu’au développement d’activités économiques sans les acteurs traditionnels. Le crowdfunding qui contourne tous les circuits bancaires et financiers traditionnels en est un exemple criant. Une seconde économie invisible, digitale, connectée, spontanée se met et en place et elle fait un mal énorme à l’économie tangible, visible que nous connaissons. La fin des activités d’intermédiation et de coordinationD’une certaine mesure ce sont tous les rôles d’intermédiation et de coordination qui sont aujourd’hui en voie d’extinction dès qu’une collaboration efficace se met en place.. On rétorquera, à juste titre, que si ces rôles disparaissent d’autres émergent et c’est vrai. Mais le taux de remplacement est largement inférieur à 1:1. Et s’il existe un lieu où les rôles de coordination et d’intermédiation sont pléthoriques c’est bien l’entreprise. D’ailleurs lorsqu’on demande quels sont les bénéfices attendus d’une meilleure collaboration on obtient souvent les mêmes réponses : une coordination plus fluide, moins d’intérmédiaires entre celui qui a un besoin et celui qui a la réponse etc. On en revient au traditionnel débat sur l’évolution du rôle du manager, de courroie de transmission à facilitateur : non la fonction ne disparaitra pas mais elle évoluera. Mais une chose est certaine : elle diminuera d’un point de vue quantitatif et la grande majorité de ceux qui ne servaient que de rouage devra se retrouver une autre raison d’être. Très facile à dire vu de l’extérieur mais, dans les faits, demander à quelqu’un de participer activement à un projet dont il comprend qu’une des conséquences sera de le rendre inutile sans qu’il voit quelles seront ses alternatives ensuite n’est pas la chose la plus simple. Travailler ou participer ?J’ai déjà entendu des gens dire « j’aurai réussi le jour où j’aurai rendu ma fonction inutile ». Mais il faut avoir certaines certitudes et une vision solide de l’avenir pour en arriver là. Remarquez bien que ceux-ci font bien la différence entre eux et leur fonction du moment. Cela pose la question de l’employabilité, de la polyvalence, de la résilience. Mais n’occulte pas, une fois encore, qu’il est fort peu probable que les activités nouvelles générées par le changement remplacent celles qu’il détruit avec un taux de 1 pour 1. Voilà pour les faits bruts. Maintenant cela n’empêche pas qu’une meilleure collaboration à grande échelle crée énormément de valeur et que la vraie question qui se pose est d’apprendre à lier revenu et activité plutôt que revenu et travail. Hors et dans l’entreprise. Car l’idée de rendre son job inutile puis de se consacrer à une économie de la participation qui ne rémunère pas ne séduira pas grand monde. Cet article Le problème d’une collaboration efficace : elle rend les gens inutiles est apparu en premier sur Bloc-Notes de Bertrand Duperrin. Related posts:
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Quand la Poste construit sa stratégie en mode participatif Posted: 25 Jul 2013 12:00 AM PDT Le Groupe La Poste a mobilisé ses salariés pour construire ses orientations stratégiques pour les 5 ans à venir. Vous n’avez pas pu rater cette Dataviz parue il y a quelques temps qui montrait l’ampleur du phénomène de mobilisation : 150 000 postiers ont participé à la démarche (les 2/3 des effectifs) et ont généré 45 813 idées. Maintenant l’aspect quantitatif des choses est une chose mais derrière les chiffres et les belles animations il y a une réalité humaine, un projet et c’est cette partie qui intéresse certainement davantage les entreprises désireuses de se lancer dans une telle démarche. La direction de la stratégie du Groupe La Poste a aimablement accepté de répondre à quelques unes de mes questions sur le sujet, par l’intermédiaire d’Olivier Dressayre, Adjoint à l’Innovation et aux Partenariats.
Pourquoi le choix d’un dispositif exclusivement offline ? Le dispositif n’était pas exclusivement off-line ! Nous avions d’abord à tenir compte de 2 réalités : un délai court pour consulter et une très vaste population dont une grande partie – du fait même de son activité (facteurs, agents de livraison, guichetiers,…) – ne peut se connecter sur le lieu et pendant le temps de travail. D’autre part, nous voulions absolument un échange direct, dans les équipes naturelles, autour du manager le plus proche dans une logique d’atelier où se déroule une vraie discussion. Ce dispositif principal a été relayé par une plate-forme en ligne. Celle-ci avait trois vocations principales :
Un site mobile était également accessible pour le dépôt, la lecture et la discussion des idées proposées sur la plate-forme. Dans cette opération, le on-line n’était certes pas la 1ère priorité mais, par contre, un canal complémentaire indispensable. Sur les 45 000 idées combien ont été retenues et dans quelles proportions ont- elles permis de faire émerger des sujets / actions qu’une approche traditionnelle aurait négligés ? D’abord, il s’agit d’un exercice collectif qui va bien plus loin, en termes de mobilisation et d’expression libre, qu’un sondage auprès d’un échantillon d’individus. Comme il s’agissait aussi de partager un diagnostic sur le Groupe, le chemin parcouru depuis 10 ans, sa situation présente, nous avons maintenant la certitude, mesurée, que chaque participant a appris quelque chose, indépendamment de sa place dans un métier ou dans la ligne hiérarchique. Sur les contributions recueillies, très majoritairement en atelier de 5-6 personnes, elles s’avèrent de natures diverses : réflexions générales, grands principes ou idées d’actions plus précises. L’intégralité de ce matériau très riche a été utilisée : d’abord classées à l’aide d’un outil sémantique, les contributions ont fait aussi l’objet de relectures et de vérifications humaines très vigilantes. Ce qui en ressort à ce stade, ce sont d’abord, sur le plan général, et avec une force qui est incontestable du fait du nombre :
Quant aux idées plus précises (15 à 20 % du total), elles seront confrontées, dans la durée, avec des projets passés, en cours ou encore à lancer, en accord avec chaque Métier du Groupe et, souvent, en association entre eux. Après ce dispositif, comment gérer les attentes générées, expliquer ce qui a été retenu ou non et pourquoi ? C’est tout l’enjeu d’une démarche participative, et nous n’avons pas de réponse toute faite ! Il est bien normal d’apporter tout d’abord un retour à l’ensemble des postiers sur les contributions produites. C’est d’ailleurs une attente formulée très forte : savoir ce que leurs collègues ont dit. Un « cahier de contributions », tiré à 250 000 exemplaires, vient déjà, 3 semaines après la clôture de la consultation, d’être adressé à tous les postiers dans ce but (accessible aussi en intranet !). Ensuite, dans le plan stratégique lui-même, nous nous attacherons à mettre en évidence ce qui vient de cette grande consultation. Enfin, bien sûr, il y aura un travail managérial, dans chaque métier et à différents échelons territoriaux, pour prendre en compte et creuser les idées précises proposées. De manière plus générale quel dispositif de suivi sera mis en place ? Est-ce un « one-shot » ou La Poste entend-elle rentrer dans une logique d’écoute/conversation permanente avec les postiers ? L’exigence de participation est une attente durable qui concerne le Groupe La Poste, comme d’autres grands employeurs. Une démarche participative « one-shot » n’a donc pas de sens quand nous plaçons la qualité de vie au travail aux tous premiers rangs de nos priorités et la considérons comme un levier majeur de la performance. Etre à l’écoute de toutes les parties prenantes est plus que jamais dans notre vocation et bien plus qu’une posture conjoncturelle. Il est vrai qu’il reste beaucoup à inventer, soyons lucides, sur les modalités de cette conversation durable. ————- J’en profite pour remercier Olivier Dressayre pour sa disponibilité et les équipes digitales du Groupe La Poste pour leur célérité dans la mise en relation. Je reviendrai bien sur prochainement sur cette initiative et cette interview avec un regard plus analytique mais auparavant nous parlerons d’une initiative similaire à la Société Générale. On aura ensuite la matière pour avoir un regard croisé et un peu de recul sur une pratique qui séduit de plus en plus d’entreprises.
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