Et si la France se dotait d’un réseau de recharge pour les véhicules électriques, à l’image de celui des stations essence ? L’idée fait son chemin dans les cabinets ministériels. Selon nos informations, l’Etat réfléchit à la création d’un opérateur national dans les infrastructures de recharge, capable de créer et gérer un maillage territorial, à l’image d’un Total ou Esso dans les stations-service. « Il faut aller plus loin dans l’impulsion publique pour faire décoller pour de bon le véhicule électrique. L’intérêt d’un opérateur public, c’est de centraliser les actions, et de monter un plan d’action national », indique une source proche du dossier. L’opérateur aurait pour mission de mettre en place et de gérer plusieurs milliers de bornes de charge rapide (5.000 environ) le long des routes et des autoroutes. Ces bornes peuvent recharger un véhicule en 30 minutes seulement. Le développement des infrastructures au Japon pourrait servir d’exemple . Le ministère du Redressement productif centralise le dossier, qui devra encore attendre l’arbitrage de Matignon, a priori d’ici à cet été.
Si les experts s’accordent sur le fait que, dans 90% des cas, la recharge s’effectuera au domicile ou au travail, l’existence de bornes publiques paraît nécessaire pour garantir le décollage du marché et rassurer l’automobiliste. Plus globalement, l’idée est de donner un coup de fouet à un programme encore timide : l’Hexagone compte environ 5.000 points de recharge répertoriés, soit autant que les Pays-Bas ou la Grande-Bretagne, mais principalement dû aux 4.000 bornes du réseau d’auto-partage Autolib’. La mission Hirtzmann, dotée de 50 millions d’euros pour accélérer le déploiement de bornes, peine à avancer dans ses discussions avec les collectivités.
ERDF, en charge du raccordement et du renforcement du réseau, apparaît comme un candidat naturel. Mais d’autres entreprises pourraient aussi se porter candidat à un éventuel appel d’offres, en particulier Bolloré, qui a montré son savoir-faire avec Autolib’, mais aussi JCDecaux ou Veolia, voire Vinci. Le montage juridique pourrait prendre la forme d’une délégation de service public ou d’un partenariat public-privé, en transposant ce qui se fait pour les hôpitaux ou les prisons à la recharge des véhicules électriques. Le modèle d’une société publique locale est également envisagé.
Reste la question du financement – très coûteux, une borne de charge rapide coûtant entre 35.000 et 40.000 euros. L’idée du ministère est que le projet puisse être soutenu par les investissements d’avenir. Encore faut-il débloquer une enveloppe suffisante, exercice complexe, car le véhicule électrique n’a pas encore démontré son potentiel. Et trouver un modèle économique attractif pour l’opérateur désigné.
Ce projet pourrait s’inscrire dans un plan global de soutien à la mobilité électrique. Celui-ci intégrerait une revue du règlement des logements et copropriétés afin de faciliter l’installation de bornes, des incitations pour le déploiement de bornes en entreprise, la possibilité pour les délégations de services publics d’être éligibles aux investissements d’avenir, ou encore la gratuité ou des tarifs spécifiques des parkings et des péages pour les propriétaires d’un véhicule électrique. Les arbitrages ne font que commencer…